Indicateur 8 : Protection

Protection des droits fondamentaux des femmes et des filles.

Elle est garantie par divers textes de lois parmi lesquels le Code de travail et la loi N°38/PR/98 donnant la même chance aux deux sexes dans le cadre de l’emploi. 

La loi N° 06/PR/2002 garantit la promotion de la santé de la reproduction et prévoit la liberté de choisir en responsable et avec discernement de se marier ou de ne pas se marier et fonder une famille, le droit à l’information et à l’éducation. Elle interdit toutes formes de violences et le mariage des enfants et fixant l’âge officiel au mariage à 18 ans.

Le nouveau Code pénal adopté en 2017 qui prend en compte les sanctions contre les auteurs de VBG et MGF et, en son article 341, il réprime également le harcèlement sexuel.

En 2016, une Feuille de route de lutte contre le mariage d’enfants a été signée entre le ministère de la Femme et le Système des Nations Unies, en vue d’enrailler cette pratique.

Le Plan nationale Genre (PNG), élaboré en 2011, qui a pour but de promouvoir l’égalité et l’équité entre les femmes et les hommes pour un développement durable dans une vision était fixée à l’horizon 2020. Cependant, 10 ans après cette vision n’est pas atteinte dans ses objectifs ; les inégalités de genre persistent et appellent à l’élaboration de nouvelles politiques mieux adaptées et plus efficaces.

Violence basée sur le genre et cas de violences sexuelles

Il est difficile de disposer des données officielles sur les violences basées sur le genre au Tchad. Toutefois, les organisations humanitaires telles que l’Organisation des Nations Unies pour les Réfugiés publient chaque année des chiffres sur les VBG dans les zones où elle a eu à intervenir.

Ainsi, il est rapporté que le nombre d’incidents VBG identifiés durant l’année 2020 est de 1242, ce qui est une augmentation de 4,5% par rapport au nombre d’incidents VBG rapportés en 2019 (1188). Par ailleurs et sur le plan national, 17,4 % de femmes âgées de 15 à 49 ans se sentent discriminées ou harcelées sur la base du genre (7,4%), pour cause d’origine ethnique ou immigration (6,8%), sur la base de l’(orientation sexuelle (6,0%), du fait de la religion ou des croyances (5,3%), du fait de l’âge (6,5%), pour cause  d’invalidité (4,2%) rapporte INSEED et UNICEF dans un rapport publié en 2021. En outre, les VBG dépendent du milieu de vie que ce soit en zone rural ou en zone urbaine. Ainsi, le sentiment de discrimination varie en milieu rural (21,2%), en milieu urbain (16,2%).

Cependant, une proportion assez inquiétante (89,4% des femmes de 15-49 ans) estime qu’il est justifié qu’un homme batte sa femme dans certaines situations. Cela est dû entre autres aux pesanteurs socioculturelles et à un manque de sensibilisation sur ces violences sur les droits des femmes en général.

Au point de vue de la lutte, le ministère de la Femme a organisé comme chaque année en novembre 2021 « 16 jours d’activisme contre les violences basées sur le genre », contre les violences faites aux femmes et aux filles. Le thème cette année 2021 est « Une action globalisante et inclusive pour éradiquer les VBG ». Dans la même lancée, un centre d’écoute et d’assistance juridique au profit des femmes et filles victimes des violences a été inauguré dans les locaux de la Maison nationale de la femme avec un numéro d’appel qui est le 1390. Ce numéro est ouvert aux victimes de violences, viols et harcèlements qui pourront dénoncer les auteurs et trouver écoute, aide et accompagnement. Sur le plan juridique, on note l’adoption de la loi N°06/PR/2002 du 15 avril 2002, interdisant les mutilations génitales féminines (MGF), les mariages précoces et les violences domestiques et sexuelles. Il est une fois de plus difficile de s’assurer l’application de cet instrument dans la mesure où la plupart des victimes des VBG préfèrent garder le silence plutôt que de dénoncer les coupables. C’est aussi dans ce sens qu’il est créé au sein des forces de sécurité une brigade de protection des mineurs, de lutte contre les atteintes aux mœurs et au genre.

Le rapport MICS (Enquête par grappes à indicateurs multiples) de 2010 du Tchad montre que 18% des femmes âgées de 15-49 ans ont été battues (violences physiques). 12% ont été victimes de violences sexuelles.

Au Tchad, il est apparu que le taux des mutilations génitales féminines est de 45% pour toute la population féminine. La prévalence de cette pratique est plus forte à l’Est et au Sud du pays. Ces taux élevés sont répartis comme suit dans les zones orientales : arabes (95%), hadjarais (94%), Ouaddaï (91%), Fitri-bathas (86%). Il faut par ailleurs noter que ces taux sont aussi distribués selon l’appartenance religieuse comme suit : femmes musulmanes (61%), femmes catholiques (31%) et femmes protestantes (16%), (Feuille de route contre le mariage d’enfants et les mutilations génitales féminines au Tchad, Février 2019). Un espoir tout de même dans la politique de l’élimination de ces pratiques avec le recul à l’exemple de la région du Mandoul où on enregistre une réduction de 6 points (38%). La politique de lutte appuyée par la mise en place d’instruments interdisant ces pratiques contribue sans relâche au processus d’élimination complète des mutilations génitales.

La loi n° 006/PR/2002 du 15 avril 2002 portant promotion de la santé de reproduction est le principal texte législatif relatif aux MGF au Tchad. Cette loi prévoit des sanctions en vertu son article 18 et stipule que quiconque aura, par pratique, par écrit, discours, publicité ou propagande, enfreint les dispositions de la loi sera puni d’un emprisonnement de cinq mois à cinq ans et/ou d’une amende de 100 000 à 500 000 francs CFA.

Les mariages précoces et forcés sont courants ainsi que des pratiques tels le lévirat, le sororat, le rapt dans certaines communautés. Dans les foyers, les femmes sont victimes de mauvais traitements, assassinats, sévices corporels ou bastonnades ou abandon avec des enfants et des problèmes de succession (PNG).

Enfin on constate que contrairement aux décennies passées, les VBG et les discriminations faites aux femmes et celles basées sur le genre sont en régression. L’Indice de développement humain basé sur le genre (Gender Development Index) est établi à 0.76 pour le Tchad (HCR, 2021).

Violences symboliques

Les violences symboliques s’inscrivent aussi dans le chapitre des VBG, mais elles ne sont pas visibles. Elles s’expriment à travers les normes et pratiques, les représentations sociales. Au Tchad, les manuels scolaires véhiculent toujours l’image péjorative de la fille et/ ou de la femme de façon à inscrire en elles une étiquette que la plupart des celles-ci acceptent (les tâches subalternes sont le plus souvent réservées aux femmes et filles alors que les celles qui sont importante aux hommes).   Un langage humiliant, violent ou péjoratif véhicule la violence psychologique alors que les comportements injustes (tels que le partage inégal des tâches entre filles et garçons) ainsi que les viols liés aux mariages forcés, précoces, négociés, expliquent la violence symbolique. En effet, selon les informations issues de l’enquête toutes les femmes enquêtées (100%) ont confirmé avoir été psychologiquement affectées par l’une des formes de violences psychologiques ou symbolique précitées.

Personnes déplacées internes

Le Tchad subit de plein fouet les conséquences de la crise due aux agissements terroristes des éléments de Boko Haram dans la partie ouest du pays (Province du Lac), celles plus compliquées encore dues à la pandémie de covid-19, des crises résultant des conflits communautaires et des fluctuations climatiques. Ces situations d’insécurité ont entrainé des déplacements massifs de populations à l’intérieur du pays. Selon les données recueillies auprès de l’OIM (septembre 2021), les plus importants mouvements de populations sont signalés dans le bassin du Lac Tchad où sévit le groupe terroriste Boko Haram. On dénombre 402 703 personnes déplacées internes et 30 356 retournées. Cette situation de crise continue de sévir puisque les attaques de cette nébuleuse terroriste n’ont pas cessé. Au sud du pays, le conflit en République de Centrafrique et les tensions internes au Sud Est (crise de Korbol) ont aussi causé des mouvements de populations avec 89 858 retournés tchadiens. D’autres causes comme les catastrophes naturelles dues aux variabilités climatiques ont affecté plus de 246 000 personnes à l’intérieur du pays.

Grâce à la réactivité des pouvoirs publics et la présence massive des ONG, les personnes déplacées ont souvent bénéficiées des premiers secours, mais lorsque les crises s’inscrivent dans le temps, il est toujours difficile d’assurer la survie des populations souvent désorientées par les conséquences des crises subies.