Femme et défis sécuritaires
Les nouveaux défis sécuritaires liés aux différends électoraux et aux nouvelles menaces à la stabilité sous régionale (criminalité transfrontalière, terrorisme, cybercriminalité etc.) exigent plus d’actions des États et l’intégration du genre dans les processus et les programmes de sécurité. En Côte d’Ivoire, des progrès ont été réalisés dans la prise en compte de la problématique du genre dans les approches sécuritaires. Ces progrès se traduisent par l’émergence de pratiques visant tant à inclure une expertise sur le genre dans les approches sécuritaires, qu’à consulter des organisations de femmes sur le terrain. D’une manière générale, la participation des femmes dans les dispositifs sécuritaires tend à croître quelque peu, bien que cette faible amélioration ne se traduise pas systématiquement par leur capacité à influencer de manière effective les dispositifs mis en place. Outre le faible recours aux femmes dans les mécanismes sécuritaires, en vertu de certains stéréotypes, il y a également l’attitude « naturelle » de la femme à s’auto-exclure, se pensant inapte à participer de manière formelle, ou ne participant qu’à la suite d’une invitation, une attitude façonnée par des normes sociales qui mènent à une autocensure.
Présence des femmes au niveau des FDS
Les femmes représentent environ 48,3% de la population ivoirienne avec un rapport de masculinité de 107 hommes pour 100 femmes, selon les résultats du 4e Recensement général de la population ivoirienne et de l’habitat (RGPH 2014). Ce qui donne une population féminine de 10 963 087 individus sur les 22 671 331 habitants en Côte d’Ivoire. Toutefois, cette proportion féminine n’est pas reflétée dans les différents secteurs d’activités. C’est le cas notamment au niveau des forces de défense et de sécurité où les femmes sont très faiblement représentées. Elles sont à peine 2700 femmes sur près 19 993 forces de défense et de sécurité, soit environ 13% des effectifs. Les postes occupées par les femmes, dans le secteur de la sécurité, sont variés. On les retrouve dans tous les corps des forces de défense et de sécurité en Côte d’Ivoire. Néanmoins, il convient de noter qu’elles occupent principalement des postes subalternes sans véritable pouvoir d’influence ou de décision. Elles restent cantonnées à des postes subalternes et occupent des positions sexo-spécifiques dans le secteur médico-social, dans l’administration ou des positions loin du terrain ou des missions considérées comme « dangereuses ». Elles sont peu présentes au niveau opérationnel ou de gestion et de contrôle et plutôt présentes dans les tâches d’exécution et d’administration.
Présence des femmes dans missions de Paix
En Côte d’Ivoire, les femmes sont relativement peu nombreuses dans les missions de paix, et leurs actions et leur influence demeurent limitées. Des facteurs de résistances expliquent la faible présence des femmes dans les missions de paix. Il y a d’abord cette tendance forte chez certaines femmes elles-mêmes à ne pas chercher forcer les choses et à attendre d’être invitées dans les cercles de décisions. Ensuite, le système structurant les missions de paix en Côte d’Ivoire peine à se transformer face aux avancées de la femme de la société. En effet, lorsque les femmes sont invitées à participer à des missions de paix, elles sont représentées par une ou deux personnes parmi les représentants de la société civile. Cela implique que les femmes forment une seule et même voix, et que l’on ne reconnaît pas leur diversité en termes d’expériences, d’opinions et de besoins. Lorsqu’elles sont consultées, ce n’est souvent que pour parler des besoins spécifiques aux femmes, ou sujets/thématiques qui sont assimilés aux femmes. Lorsqu’elle est admise, la participation des femmes a tendance à être limitée dans le temps et dans l’impact, souvent en tant qu’observatrice avec, de ce fait, une dimension plus symbolique que substantielle.
Femmes : actrices et vectrices de conflits
Par la force des choses, les femmes tendent parfois à être actrices et vectrices des conflits. En Côte d’Ivoire, durant la décennie qu’a connu le pays, de 2002 à 2011, les femmes se sont retrouvées au cœur du conflit, tantôt en raison de la pauvreté, tantôt par réflexe de survie, et tantôt par sympathie idéologique. Pendant cette époque, certaines jeunes filles ont même rejoint les rangs des groupes armés dans le pays. Au fil du temps, elles se sont lassées de la guerre qui a désagrégé des familles entières. Le processus DDR les a pris en compte. L’objectif du programme de désarmement était de désarmer tous les belligérants qui ne pouvaient pas être intégrés dans les forces de sécurité et de les réinsérer dans la vie civile. Le programme DDR constituait à ce titre une première étape dans la poursuite de la réforme du secteur sécuritaire. Car au cours du processus de désarmement s’est décidé quels combattants rejoindraient les forces de sécurité nouvellement créées et lesquels démarreraient une nouvelle vie civile, quels rapports ils entretiendraient avec le reste de la société ainsi que le sérieux de la dissolution des structures de pouvoir et des milices datant des années de guerre au profit d’un nouvel ordre politique et social pacifié. Le DDR était par conséquent un processus politique et social, dont l’issue allait bien au-delà d’une influence directe sur la vie d’ex-combattants, mais se répercutait également sur le climat social et la répartition du pouvoir au sein de l’État. Le résultat du processus de DDR en Côte d’Ivoire est considéré comme une réussite à l’échelle internationale : d’après le gouvernement 95% de tous les combattants répertoriés ont été réintégrés à la vie civile.